La commission des comptes de la sécurité sociale a rendu son verdict : le déficit du régime général et du FSV (fonds de solidarité vieillesse) devrait atteindre 5,5 Md€, soit 1,3 Md€ de plus qu’attendu. Ce sont la branche maladie et le FSV qui tirent les résultats vers le bas. Pour 2018, la commission donne l’alerte : si le taux d’évolution de l’Ondam devait être supérieur en 2018, « il en résulterait une majoration des dépenses et une aggravation du déficit ». Ainsi, un Ondam fixé à 2,3 % (le gouvernement évoque un taux de 2,3 % « en moyenne » sur le quinquennat) accroîtrait le déficit de 600 M€ environ en 2018. « Le PLFSS 2018 doit être l’occasion de revoir la trajectoire financière de la sécurité sociale à moyen terme », estime la commission.

La ministre des Affaires sociales du gouvernement précédent Marisol Touraine se réjouissait d’avoir « sauvé la Sécu » avec un déficit ramené à 400 millions d’euros en 2017, hors FSV, le « trou » serait encore de 1,6 milliard, selon les prévisions de la Commission des comptes de la sécurité sociale, dont le rapport a été remis ce jeudi 6 juillet 2017 à la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn et au ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérard Darmanin. C’est beaucoup moins qu’en 2016 (4,1 milliards d’euros) ou qu’en 2012, mais c’est une mauvaise nouvelle, qui va dans le sens de l’alerte formulée quelques jours plus tôt par la Cour des comptes.

En tenant compte du FSV, le déficit du régime général s’élèverait à 5,5 milliards d’euros, en amélioration de 2,2 milliards d’euros par rapport à 2016, mais en dégradation de 1,3 milliard d’euros par rapport à la prévision de la LFSS. Sachant, précise la commission, que le déficit prévisionnel 2017 du régime général et du FSV est minoré à hauteur de près de 900 millions d’euros par un produit versé à la Cnamts dans le cadre des opérations de mise en place du fonds de financement de l’innovation pharmaceutique, décidé par la LFSS 2017 (lire sur AEF) et qui a bénéficié d’une dotation initiale de 876 millions d’euros provenant des réserves inutilisées de la section III du FSV (lire sur AEF). « Hors cette recette exceptionnelle, le déficit du régime général et du FSV s’élèverait à 6,4 milliards d’euros, en retrait de 1,4 milliard d’euros seulement par rapport à 2016 ».

l’assurance maladie dans le viseur

Si des économies ont été réalisées en matière de gestion administrative, le solde 2017 est plombé par un effet de base négatif de 700 millions d’euros (écart entre la prévision de solde pour 2016 prévue fin 2017 et la réalisation), et surtout par des recettes inférieures de 1,05 milliard aux attentes, qui s’expliquent par des revenus d’activité moins dynamiques que prévu en 2016 et des recettes fiscales révisées à la baisse.

Côté dépenses, c’est l’assurance maladie qui tire les résultats vers le bas. Son déficit atteindrait 4,1 milliards en 2017, soit 1,5 milliard de plus que prévu par la LFSS. De plus, la réduction du déficit affiché de la branche de 700 millions d’euros par rapport à 2016 tient uniquement à la recette exceptionnelle en provenance du FSV : hors cette opération, le déficit de la Cnamts se serait dégradé de 200 millions d’euros, à 5 milliards d’euros. Sans compter, précise la Commission, que la Cnamts a par ailleurs bénéficié d’un transfert de recettes en provenance des autres branches (principalement la Cnavts) à hauteur de 1,3 milliard d’euros.

inquiétude sur le FSV

La commission rappelle l’avis du 30 mai 2017 du comité d’alerte de l’Ondam, qui stipule que l’Ondam tel que voté en LFSS pour 2017 devrait pouvoir être respecté, les crédits mis en réserve étant d’un niveau suffisant pour faire face aux aléas aujourd’hui identifiés.

L’autre point d’inquiétude est le déficit du FSV, qui devrait à nouveau s’aggraver pour atteindre 4 milliards d’euros, du fait d’une baisse des dépenses (-3,6 %) moins rapides que celle des produits (-6,3 %). La réforme du minimum contributif inscrite en PLFSS 2017 conduirait à une économie de 1 milliard d’euros en 2017 pour le FSV. Cet effet serait à nouveau atténué par les effets d’une mauvaise situation économique, à savoir une hausse des prises en charge de cotisations au titre des périodes non travaillées : chômage (+200 millions d’euros) et maladie (+100 millions d’euros).

A contrario, l’amélioration du régime général concerne principalement la branche famille, qui serait en excédent de 500 millions d’euros (contre un déficit de 1 milliard en 2016), pour la première fois depuis 2007, en raison notamment de la réforme des allocations familiales ainsi que de la poursuite du ralentissement de la natalité et du moindre recours à la Preparee (Prestation partagée d’éducation de l’enfant).

la branche AT-MP toujours excédentaire

Les améliorations sont plus marginales pour les branches retraite et AT-MP bien que leurs résultats soient positifs. Concernant la vieillesse, elle dégagerait un excédent de 1,1 milliard d’euros, supérieur de 200 millions à celui enregistré en 2016, mais inférieur de 500 millions d’euros à la prévision initiale. La commission des comptes explique ce résultat par l’impact particulièrement fort en 2017 des différentes mesures de report d’âge inscrites dans les dernières réformes des retraites.

Quant à la branche AT-MP, son excédent progresserait légèrement de 762 millions d’euros à 919 millions d’euros. Les charges au titre des rentes d’incapacité permanente, de la cessation d’activité anticipée au titre de l’amiante et de la gestion administrative enregistrent une baisse, compensée en partie par la hausse de la dotation du Fiva (Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante) ainsi que par l’accroissement du transfert à la Cnav au titre des départs dérogatoires pour pénibilité et amiante. Les produits ont subi notamment la baisse de 0,06 point du taux moyen de cotisations dues par les entreprises, identique à 2016.

plusieurs points de vigilance

Au vu de ces résultats, la commission des comptes identifie plusieurs risques pour l’exercice 2018, qui sera déjà pénalisé par un effet de base négatif. Elles concernent les recettes et les dépenses de l’assurance maladie :

– La prévision de recettes de la LFSS repose sur une évolution de la masse salariale de 3,6 %, alors que le programme de stabilité a revu cette progression à 2,9 %. Si cette nouvelle prévision devait se vérifier, les recettes du régime général seraient amputées de plus de 1,4 milliard d’euros.

– Le produit exceptionnel de 900 millions d’euros en provenance des réserves du FSV dont a bénéficié la Cnamts en 2017 étant non reconductible, un risque de même ampleur pèse sur les recettes de la caisse en 2018.

– Le programme de stabilité, comme la loi de financement, reposent sur une prévision d’évolution moyenne de l’Ondam de 2 % sur la période 2017-2020. Si le taux d’évolution de l’Ondam devait être supérieur en 2018, « il en résulterait une majoration des dépenses et une aggravation du déficit ». À titre d’exemple, un Ondam fixé à 2,3 % accroîtrait les dépenses – et donc le déficit – de 600 millions d’euros environ en 2018. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 doit être l’occasion de revoir la trajectoire financière de la sécurité sociale à moyen terme, estime la commission.