La direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) du ministère de la Santé a publié sa livraison annuelle des « Dépenses de santé » pour l’année 2020.

Ce panorama détaillé, qui englobe l’ensemble de la consommation de soins financée par l’Assurance-maladie, les complémentaires, les collectivités locales et les ménages, est le reflet du paradoxe de la crise sanitaire et de son « quoi qu’il en coûte ». D’un montant total de 209,2 milliards d’euros, les dépenses de soins et de biens médicaux ont connu la plus faible progression annuelle depuis les années cinquante : à peine 0,4 %.

Hausse des prix, baisse d’activité

Seuls quatre secteurs ont contribué largement à la hausse, pour des raisons conjoncturelles s’agissant des deux premiers et plus structurelles pour les seconds : les soins hospitaliers publics, les dépenses de laboratoires d’analyse, les soins infirmiers et les soins de sages-femmes. Tous les autres secteurs sont orientés à la baisse.

La croissance des dépenses de santé est d’ailleurs « intégralement portée par une hausse des prix en 2020 (+4,6 %) », note la Drees, ajoutant que « les volumes de soins sont quant à eux en forte baisse (-4,0 %), de nombreux secteurs ayant subi une importante chute de leur activité lors du premier confinement entre 17 mars et le 11 mai ».

L’hôpital public en hausse

À l’hôpital, la croissance des dépenses (+3,7 % contre + 2,1 % l’année précédente), d’un montant global de 100,5 milliards d’euros, est portée par des vents contraires. Le poste des soins hospitaliers publics a progressé de 5,6 %, augmentation essentiellement liée aux rémunérations des agents qui ont bénéficié de primes exceptionnelles et de majorations d’heures supplémentaires et aussi aux premiers effets des revalorisations du « Ségur de la santé ». Le reste de la hausse des dépenses est dû aux surcoûts liés à la prise en charge des patients atteints par le Covid-19 (équipements pour la réanimation, tests, etc.).

À l’inverse, l’hôpital privé fait les frais des déprogrammations de confinement. Les dépenses sont ainsi en baisse de 2,4 %, une diminution qui touche pratiquement tous les secteurs : -5,7 % en MCO, -8 % pour les SSR (soins de suite et de réadaptation) et -8,6 % pour les honoraires perçus par les praticiens exerçant en clinique.

Mais l’explication est aussi à chercher ailleurs. En particulier, « le recul plus marqué chez les enfants de 2 à 14 ans et pour les séjours liés à des motifs ORL, maladies infectieuses et maladies de l’appareil respiratoire est probablement dû à l’application des mesures sanitaires et des gestes barrières » estime la Drees. En revanche, la baisse du nombre de séjours pour des pathologies graves et aiguës « peut être liée à la fois à un moindre recours (par exemple, la peur d’être contaminé en se rendant à l’hôpital ou de participer à la saturation des services d’urgences) et à des difficultés d’accès aux soins » note l’enquête.

Les dépenses de ville à la baisse

S’agissant de la médecine de ville, à l’exception des laboratoires de biologie, la baisse des dépenses est flagrante. Le dépistage massif et généralisé du Covid a dopé les dépenses de 37,6 % dans les laboratoires, dont l’activité a été au dernier trimestre 2020 deux fois supérieur à celle du mois de janvier.

Les soins des médecins généralistes ont été globalement en baisse pendant les deux vagues épidémiques de l’an passé. Du coup, la consommation de soins de médecine générale a diminué en valeur de 4,2 % et de 4,4 % en volume. Pour les spécialistes, la chute est encore plus prononcée : respectivement -5,6 % et -6,3 %.

À noter que la part des forfaits dans la consommation des soins de médecine générale est passée de 15 % en 2019 à 18 % en 2020, un mouvement de fond.

La position du régime obligatoire se renforce

La consommation de médicaments poursuit, pour sa part, sa tendance baissière depuis six ans (-3,4 %).

La crise sanitaire a eu pour conséquence un renforcement de la position de l’Assurance-maladie obligatoire puisque la Sécu a pris en charge 79,8 % de l’ensemble des dépenses de santé en 2020, soit 1,9 point de plus que l’année précédente. Il provient « en premier lieu de la crise sanitaire qui a engendré des dépenses supplémentaires majoritairement financées par la Sécurité sociale » note la Drees.

Ces constats seront présentés lors de la Commission des comptes de la Sécurité sociale, le 24 septembre prochain, par le gouvernement qui y dévoilera également les grandes lignes du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2022. Des mesures correctives sont à prévoir.

Source : lequotidiendumedecin.fr