Les députés Agnès Firmin Le Bodo (Agir) et Jean-Carles Grenier (LR) ont présenté ce 16 juin 2021 le contenu du rapport final sur les ARS, fruit de six mois d’auditions au sein de la Mecss. Ce rapport dresse un bilan « en demi-teinte » de l’action des agences régionales, en déplorant notamment une certaine déconnexion du terrain et une trop grande focalisation sur le pilotage de l’offre de santé au détriment des missions de santé publique. Sans changer le périmètre de leurs missions, le rapport propose de relégitimer les ARS, notamment en renforçant leur échelon départemental.
C’est à l’issue d’une cinquantaine d’auditions et de six de travail que les députés, et rapporteurs pour la Mecss, Agnès Firmin Le Bodo (Agir) et Jean-Carles Grenier (LR) ont présenté publiquement le rapport final de la mission parlementaire d’évaluation consacrée aux ARS.

Concernant le jugement sur l’action des ARS, durant la crise et au-delà au cours de ces dernières années, les députés font état d’un bilan en « demi-teinte », avec de faibles performances par rapport aux objectifs de renforcement de la prévention santé et de territorialisation des politiques de santé. Les rapporteurs concluent que « les ARS semblent n’avoir pu véritablement répondre qu’à l’un de ces objectifs fixés par le rapport Ritter [de 2008] : conduire les restructurations hospitalières et accompagner la recherche de performance des acteurs hospitaliers ».

Globalement, les députés reprochent aussi aux agences régionales d’avoir au fil du temps développé une « focalisation excessive » sur leur mission de régulation de l’offre de santé, et ce au détriment des missions de santé publique. Le rapport avance ainsi que les missions de sécurité sanitaires des ARS ont été « marginalisées » du fait du poids pris par le pilotage de l’offre – marginalisation se répercutant de manière « inquiétante » sur les compétences techniques et les corps d’inspection au sein des ARS. Une partie du rapport est également consacrée aux multiples témoignages et éléments accréditant l’idée d’un « éloignement » des ARS par rapport aux réalités de terrain – un éloignement ayant de multiples causes, dont notamment le manque de moyens humains au niveau des délégations départementales.

Dans le même temps, les députés relativisent aussi certaines critiques quant à « l’hospitalocentrisme » des ARS, notamment lors de la gestion de la crise sanitaire, en soulignant que ce biais est « loin d’être le fait des seuls ARS » et concerne l’organisation du système de santé français dans son ensemble. Du côté des points positifs, le rapport estime aussi que les agences ont plutôt bien réussi leur acculturation aux spécificités du secteur médico-social. « Le tournant du médico-social a été bien pris par les ARS », conclut le rapport, en soulignant que la gestion de ce secteur mobilise près de 35 % de leurs effectifs. Le rapport salue également une compétence  » de mieux en mieux partage » avec l’assurance maladie concernant la médecine de ville.

les propositions pour « relégitimer » les ARS

En amont de la présentation de leurs propositions de réforme, les rapporteurs rappellent que le périmètre de missions des ARS, fixé initialement de manière « ambitieuse » par la loi HPST, « pose aujourd’hui la question de leur capacité à assurer l’ensemble de leurs missions de façon satisfaisante ». Ayant fait état des multiples critiques à cet égard, les députés indiquent cependant rester « profondément attachés » à la logique de décloisonnement des questions de santé qui avait conduit à la création des ARS : « alors qu’il apparaît de plus en plus clairement que la santé environnementale comme la veille et la sécurité sanitaire comptent parmi les plus grands défis auxquels nous devons aujourd’hui répondre, l’heure ne peut pas être au rétrécissement du champ sanitaire ». À défaut d’une restriction du périmètre de missions des ARS, le rapport propose donc une « clarification » et « simplification » des missions des ARS pour renforcer leur « légitimité ».

Le renforcement de l’échelon départemental
. Le premier axe de proposition porte sur le rapprochement des ARS de la réalité du terrain, de nombreuses auditions ayant abouti au constat d’une certaine déconnexion et d’un « sentiment d’éloignement » des ARS. Pour aboutir à ce résultat, le rapport propose de renforcer le niveau départemental des ARS. « Les directeurs départementaux ne doivent plus être de simple « courroies de transmission » mais doivent se voir investis de davantage de responsabilités, et leurs équipes doivent être renforcées », préconisent ainsi les députés en listant une série de propositions allant en ce sens.

Le renforcement des contre-pouvoirs.
Le rapport propose aussi de renforcer les « contre-pouvoirs » régionaux chargés de contrôler l’action des ARS. Le texte évoque ici le sort des conférences régionales de la santé et de l’autonomie (CRSA) et celui du conseil de surveillance des ARS. Concernant le conseil de surveillance, les députés proposent de transformer le conseil de surveillance des ARS en conseil d’administration coprésidé par le président du conseil régional et le préfet de région, et de donner à ce conseil d’administration « le pouvoir de se saisir de tout sujet entrant dans le champ de champ de compétence de l’agence ». Ce conseil rénové aurait aussi la faculté d’approuver le budget et les documents financiers de l’ARS.

En parallèle, les rapporteurs préconisent de renforcer la « transparence » sur l’utilisation des crédits en obligeant les agences à produire un rapport annuel sur l’utilisation des crédits FIR et Migac. Toujours quant à la politique d’utilisation des crédits, la proposition n° 20 plaide pour « fusionner, en un seul budget annexe, l’ensemble des crédits à la main des ARS, en leur donnant la plus grande latitude possible dans leur utilisation ».

Une nouvelle logique de contrôle. En ce qui concerne les relations avec les établissements de santé, les parlementaires invitent à « tirer les leçons de la crise sanitaire et à « davantage faire confiance aux établissements de santé et à substituer à des mécanismes de vérification continue et d’autorisations a priori des mécanismes de contrôle et d’inspection a posteriori ». Traduisant cette invite des parlementaires, la proposition n° 15 recommande de « simplifier les régimes d’autorisation d’activités des établissements de santé et les transformer, lorsque cela est possible, en régimes de déclaration, notamment en ce qui concerne les créations et fermetures de services ou de lits ».

La question des moyens. À plusieurs reprises dans le rapport, les failles constatées dans l’atteinte des objectifs sont reliées, du moins en partie, aux contraintes que subissent les ARS en termes de ressources humaines. dans une dernière partie du rapport, les parlementaires soulignent ainsi que les effectifs de ces agences ont diminué en moyenne de près de 9 % entre 2021 et 2018 – avec des baisses atteignant les 14 % dans certaines régions. Le rapport se conclut en remarquant ainsi que, « si la simplification des missions des ARS devrait permettre dans un second temps d’alléger la charge de travail, l’attention doit aujourd’hui être portée sur la préservation de ces effectifs, nécessaire à la réalisation par les ARS de l’ensemble des missions dont elles ont la charge ».