Dans un avis adopté le 22 avril, le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) propose une réforme de la régulation du système de santé qui repose en grande partie sur une refonte de l’Ondam (objectif national des dépenses de l’assurance maladie). Ce rapport fait suite à une demande d’Olivier Véran. L’objectif est de repenser l’organisation du système de santé afin « d’apporter avec des moyens renforcés en proximité une réponse de qualité à l’ensemble des besoins de santé », mais aussi de consolider « les moyens les plus spécialisés et lourds pour en maintenir l’excellence », souligne le HCAAM.
Cela nécessite des investissements importants, dont les effets ne seront visibles qu’à moyen terme, explique l’instance qui ajoute que notre cadre actuel de régulation « n’est pas compatible avec cet horizon de transformation ».

Sortir d’une vision court-termiste
Parmi la vingtaine de propositions mises sur la table, le HCAAM recommande par exemple d’investir dans des champs hors santé : éducation, logement, conditions de travail, environnement…, mais qui contribuent à l’amélioration de l’état de santé. « Les effets sur la santé doivent beaucoup plus systématiquement être pris en compte dans la programmation des autres politiques », écrit-il.
Côté régulation, le rapport estime qu’en France la vision est trop court-termiste. Il considère notamment qu’on a trop souvent sacrifié « des réformes qui génèrent des coûts immédiats et des bénéfices plus lointains » et que les investissements, l’innovation, la prévention ont trop souvent servi « d’ajustement à la contrainte budgétaire de la décennie passée ». « Il s’agit de passer d’une programmation pluriannuelle incantatoire à une programmation stratégique, qui ne soit pas seulement budgétaire », préconise le HCAAM.

La proposition est donc de passer sur une trajectoire à cinq ans des objectifs, activités et ressources du système de santé. « Les objectifs de santé et de transformation de l’offre de soins à l’horizon de cinq ans et la programmation des moyens humains, matériels et financiers pour atteindre ces objectifs doivent être présentés dans un document unique, unifiant les textes existants », recommande l’avis. Un document qui doit être élaboré en accordant une vraie place à la démocratie sanitaire et aux acteurs locaux également. En découleraient les autres textes, comme la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS), qui se verrait « simplifiée, plus transparente et hiérarchisée ». Cette programmation sur cinq ans devra intégrer les innovations technologiques et organisationnelles, mais aussi un volet ressources humaines avec une prospective quantitative : effectifs et répartition, et qualitative : compétences, missions, lieux d’exercice etc.

Mettre des objectifs en face des ressources
L’Ondam et sa philosophie devraient lui aussi être repensé. La crise Covid notamment a mis en lumière les limites du système actuel. « Ces tensions et la crise Covid ont conduit le gouvernement à desserrer provisoirement la contrainte, essentiellement à l’hôpital. Une partie de ces sommes constitue un rattrapage de financements antérieurs insuffisants. Alterner une longue période de fortes contraintes budgétaires et un afflux massif de crédits est déstabilisant pour les acteurs et ne permet pas une allocation optimale des ressources ». Pour le HCAAM, il est primordial de relier ces ressources financières à des objectifs de santé, économiques et organisationnels. Cela passe notamment par une présentation de l’Ondam qui montre « en quoi ces ressources contribuent à la politique de santé et à l’amélioration de l’état de santé ». À titre informatif, le HCAAM suggère également de renseigner dans le Plfss, des données sur les comptes des établissements de santé et leurs déficits ou l’agrégat des produits de santé remboursés par l’assurance maladie. Le rapport suggère aussi de découper l’Ondam, non plus en fonction des producteurs de soins, mais de la destination des soins : soins de premier recours, soins hospitaliers aigus, soins de réadaptation, grand âge, handicap et dépendance et coordination et missions d’intérêt général.

En prolongement, une réflexion sur les modalités de rémunération des professionnels de santé devra aussi être menée et notamment sur la réduction de la rémunération à l’acte en ville comme à l’hôpital.
Redonner du poids aux territoires.

Au niveau santé publique, l’avis propose d’intégrer des dépenses de prévention en ambulatoire dans le panier de soins comme : l’éducation thérapeutique, les psychologues ou les nutritionnistes. Enfin, même si la politique de santé doit rester nationale, le HCAAM considère qu’il faut donner davantage de marges de manœuvre aux acteurs territoriaux. Cela pourrait passer par un développement du FIR (fonds d’intervention régional) notamment, ou par la régionalisation des aides à l’installation des professionnels de santé.